40 - L'aqueduc Médicis
45 – La Maison du Fontainier




En 1612, la reine mère et régente Marie de Médicis fait l’acquisition d’un hôtel particulier, aujourd’hui le « Petit Luxembourg », de son domaine et de quelques propriétés adjacentes. Elle a le projet d’ériger un palais mariant les styles français et florentin, et d’aménager un vaste jardin avec bassins et jeux d’eau.

L’eau nécessaire y est apportée des hauteurs de Rungis par l’aqueduc justement appelé Médicis, construit entre 1612 et 1623 (cf. 40).

La veuve d’Henri IV avait envisagé pour son jardin nombre de grottes, fontaines, bassins et terrasses avec jeux d’eau, dont la fontaine Médicis reste le seul témoignage, malgré les nombreuses transformations opérées depuis lors.

La « grotte du Luxembourg »

La reine voulait retrouver l’atmosphère des nymphées et fontaines des jardins italiens de son enfance, en particulier celle de la grotte de Buontalenti dans les jardins de Boboli à Florence.

Elle en confia probablement la réalisation à l’ingénieur florentin Thomas Francine (Francini), déjà auteur de la « Maison du Fontainier » (cf. 45), et à Salomon de Brosse, l’architecte du palais, en 1630 (bien que la plaque à l’arrière de la fontaine indique 1620 et Jacques de Brosse, nom donné par erreur à Salomon par plusieurs biographes).

Ce fut d’abord un simple portique à l’italienne, à colonnes toscanes et congélations, surmonté d’un fronton aux armes de France et adossé à une annexe du palais sur l’emplacement de l’actuelle rue de Médicis.

Le palais devient Sénat en 1799

De vastes travaux sont entrepris par Chalgrin pour accueillir l’assemblée du Sénat.

Il apporte des modifications à la fontaine, installe une vasque à son pied et installe dans la niche une Vénus de marbre blanc.

Les travaux d’Haussmann

La nouvelle rue Médicis entaille le jardin du palais dans sa partie nord-est ; son tracé passe à l’emplacement de la fontaine.

En 1867, celle-ci est déplacée de 30 mètres, pierre par pierre, vers l’intérieur du jardin. Gabriel Davioud, architecte en vogue sous le Second Empire, et Adolphe Alphand, responsable des jardins, conçoivent l’écrin tel qu’il est aujourd’hui : un vaste bassin-miroir rectangulaire bordé de deux rangées de platanes.

Sur le fronton, encadré par deux niches avec Diane chasseresse d’un côté et un faune de l’autre ; la Vénus est remplacée par les sculptures d’Auguste Ottin : Polyphème surprenant Galatée dans les bras d'Acis.

La grotte du Luxembourg par Jean-Baptiste Maréchal (1779-1824)

Gallica.bnf.fr

« Fantaisie avec la Grotte du Luxembourg » (Gallica.bnf.fr)

La grotte du Luxembourg ornée de la Vénus en marbre

Pierre-Nicolas Ransonnette (1745-1810) – Gallica.bnf.fr

Au dos de la fontaine, l’ex fontaine du Regard

Lorsque la fontaine Médicis est déplacée sous le Second Empire, il faut habiller la face qui était cachée jusqu’alors. Par chance, si l’on peut dire, le percement de la rue de Rennes avait nécessité le démontage en 1856 de la fontaine, dite du Regard, au coin de la rue éponyme et de la rue de Vaugirard.

Cette fontaine avait remplacé en 1806 le regard d’une canalisation transportant l’eau de l’aqueduc Médicis depuis la « Maison du Fontainier » ; une parmi la quinzaine de fontaines créées cette année-là par décret impérial, telles la fontaine du Fellah, rue de Sèvres, et la fontaine du Palmier, place du Châtelet.

Elle était surmontée d’un fronton orné de l’aigle impérial.

Achille Valois y a sculpté un bas-relief, inspiré des œuvres de la Renaissance, en particulier de celles de Jean Goujon, représentant Léda séduite par Zeus métamorphosé en cygne.

Fontaine du Regard, Jacques Swebach (1769-1823)

Gallica.bnf.fr


Arrivée à cet emplacement, la fontaine est dotée d'un nouveau soubassement et d’un encadrement monumental, un nouveau fronton surmonté de deux nymphes où une couronne remplace l’aigle. Des pilastres décorés de dauphins enlaçant de leurs queues les instruments de Neptune (trident, gouvernail) encadrent le bas-relief de Valois.

Léda et Zeus

Le bas-relief expose les amours de Zeus et Léda sous les yeux de Cupidon.

Léda, fille de Thestios, roi d’Etolie, épouse de Tyndare roi de Sparte, et mère de Clytemnestre, d'Hélène et de Castor et Pollux.

Zeus, qui craignait les foudres ( !) de la très jalouse Héra, sa femme, avait pris l’habitude de se transformer pour séduire les objets de son amour (en taureau, en aigle, en satyre, voire en pluie d’or prendre les apparences du mari). Il prend la forme d’un cygne très suggestif pour abuser la belle Léda, allongée sur les bords de l’Eurostas (fleuve de Laconie). De leurs amours naîtront deux enfants, Hélène et Pollux, dans un même œuf, alors que Clytemnestre et Castor, les enfants de son mari, naîtront dans un autre œuf. Voilà qui explique que des deux frères inséparables, l’un, Pollux, était immortel et que l’autre, Castor, ne l’était pas.

A l’origine, l’eau jaillissait du bec de bronze du cygne, tout un symbole ...

49 – la Fontaine Médicis

Jardins du Luxembourg

Une histoire d’amour rapportée par Ovide dans les Métamorphoses.

Acis, jeune berger de Sicile, fils du dieu Pan et de la nymphe Symaethis, est l'amant de Galatée, une des nombreuses Néréides. Galatée a un autre soupirant, le disgracieux Cyclope Polyphème (dont l’œil sera crevé plus tard par Ulysse). Polyphème surprend Galatée langoureusement enlacée dans les bras d’Acis ; furieux, il va arracher un rocher de l'Etna et le précipiter sur Acis. Un filet de sang coulant sous le rocher, Galatée va demander aux dieux de le changer en un fleuve pour qu'il puisse rejoindre la mer.

Ottin a joué avec les contrastes, accentuant les disproportions, en utilisant du marbre blanc (de Carrare) pour les jeunes amants et le bronze pour le cyclope.

Sources :

Françoise Masson, Marc Gaillard : Les Fontaines de Paris (Martelle éditions)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fontaine_Médicis

http://www.senat.fr/visite/fontaine/ 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Acis_et_Galatée

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fontaine_de_Léda

Le cyclope Polyphème a-t-il un ou deux yeux ? Difficile à dire