En Juillet 1996, les travaux de la ZAC de Alésia-Montsouris ont surbaissé le terrain sur 6 hectares. Ces travaux ont mis à jour deux tronçons de l’aqueduc de 150m chacun (et 150m de l’aqueduc de Lutèce). Cette portion contenait la partie souterraine du regard N°23, dit de la Ferme de la Santé. L’ensemble avait été remblayé lors de la construction de la ligne de Sceaux en 1855. L’aménagement de la ZAC n’a laissé que quelques tronçons des deux aqueducs. Quant à l’édicule existant c’est une copie de ce regard n° 25 (de Saux).
Genèse de l’aqueduc
Mise en service en 1608, la pompe de la Samaritaine dessert essentiellement la rive droite.
Cette rive droite est dotée de 13 fontaines au début du XVIIe siècle ; la rive gauche en est dépourvue. Seuls, les puits fournissent un approvisionnement minimum et d’une eau polluée. Et, pour corser l’affaire, le Paris rive gauche de l’époque, en grande partie établi sur la montagne Sainte-Geneviève, il faut creuser parfois jusqu’à 30 mètres pour atteindre la nappe phréatique. Henri IV et son ministre Sully se préoccupent du problème depuis 1594. Ce dernier envisage de reprendre la solution gallo-romaine, cad capter les eaux du plateau de Rungis, où des terrains sont acquis en 1609.
L’assassinat du roi le 14 mai 1610 met un terme provisoire au projet.
En 1612, la reine mère et régente, Marie de Médicis, fait l’acquisition du domaine dit « du Luxembourg » et de quelques lots adjacents afin d’y édifier un palais mariant les styles français et florentin, et d’aménager un vaste jardin – trois fois plus grand que le jardin actuel - avec bassins et jeux d’eau.
Le projet d’adduction d’eau de Sully est repris l’année suivante, il est confié à Jean Coingt, maître maçon. Initialement prévus pour 3 ans, les travaux se termineront en 1623, employant environ 500 ouvriers.
Les sources captées
Le "carré des eaux de Rungis" :
A la demande d'Henri IV, Sully achète des terrains à Rungis dans le but de retrouver les sources jadis captées par les Gallo-Romains - une partie seulement des sources captées par ces derniers sera utilisée - l’aqueduc de Médicis n’apportera que 40% du potentiel de son prédécesseur.
L’inauguration du bassin collecteur a lieu le 17 juillet 1613, par le jeune Louis XIII, âgé de 12 ans. Le regard n° 1 prendra le nom de « regard Louis XIII ».
Les "nouvelles eaux de Rungis" :
La quantité d’eau s’avère vite décevante, d’autant plus que quelques privilégiés se servent sur le trajet de l'aqueduc.
En 1655, on trouve deux nouvelles sources : la "source du Maillet" et la "source de la Pirouette", toujours à Rungis.
D’autres sources sont captées tout au long du trajet, à Cachan (1670), à Morangis (1782) entre autres, sur les coteaux de la Bièvre.
En 1871, Belgrand draine des sources sur le trajet de l'aqueduc de la Vanne qui s’ajoutent à la source de la Pirouette. C’est ce dernier ensemble qui alimente toujours l'aqueduc Médicis.
Tracé
L’aqueduc est long de 13 km jusqu’au château d’eau de l’Observatoire (appelé aujourd’hui la Maison du Fontainier cf 45). Bien entendu, il suit de près le vieil aqueduc de Lutèce, à un niveau légèrement supérieur.
Les communes actuelles traversées sont Rungis, Fresnes, l'Haÿ-les-Roses, Cachan, Arcueil, Gentilly et Paris.
D’une pente moyenne de 1,39 m par km, la galerie circule entre 3 et 15 m de profondeur.
Plan de l’aqueduc Médicis à la fin du XVIIe siècle (Archives Nationales)
L'eau circule dans une galerie d'environ de 1 mètre de large et 1,75 mètre de hauteur, voûte en plein cintre et murs en meulière et caillasse ; tous les 4 mètres, des "arches" en pierre de taille viennent renforcer l'ouvrage.
Deux banquettes séparées par une cunette de section carrée d'environ 40 centimètres de côté. Le tout est situé à quelques mètres en dessous du niveau du sol. Il est possible de marcher à pied sec sur toute sa longueur.
Il y avait 27 regards au long du parcours, soit un tous les 500m environ. 21 sont encore en service, la plupart sur la voie publique. Complétés par 258 trappes de visite.
Les bâtisseurs rencontrent le même problème que leurs lointains prédécesseurs gallo-romains, traverser la vallée de la Bièvre. Ils construisent un pont-aqueduc de 379m de long et d’une hauteur maximale de 19m (cf. 5).
L'aqueduc est mis en eau le 19 mai 1623 jusqu'à la Maison du Fontainier, il faudra cependant attendre encore 5 ans pour qu'il irrigue les fontaines publiques de la rive gauche.
Son débit approche les 1.300 m3 par jour.
Un débit progressivement en baisse
Malgré le captage de nouvelles sources en 1655, le débit de l’aqueduc va progressivement faiblir. Les concessions, octroyées dès la mise en service à des princes de sang ou des communautés religieuses, seront toujours plus nombreuses et certains de ces privilégiés n’hésiteront pas à agrandir leurs tuyaux. Autre cause de la baisse du débit, un entretien variable selon les époques, entretien consistant surtout à gratter les dépôts de calcite.
L’aqueduc aujourd’hui :
Les projets de l’ingénieur Belgrand sous le Second Empire bouleversent la gestion de l’eau dans Paris. Les travaux haussmanniens des voiries et des immeubles tronçonnent l'aqueduc au niveau de Paris. L'aqueduc de la Vanne va prendre le relais du "vieil aqueduc Médicis" qui n'aura plus aucun intérêt en terme d'alimentation en eau.
Les eaux de l’aqueduc Medicis sont dirigées vers les réservoirs du Panthéon et, depuis 1904, elles alimentent le lac du parc Montsouris. Depuis lors, l’aqueduc mesure 10,4km.
Quelques tronçons de la galerie sont donc encore visibles, d’autres ont été cédés à des riverains et transformés en caves, voire en abris anti-aériens.
Côté banlieue, l’urbanisation intense, le marché de Rungis, l’aéroport d’Orly, les routes et autoroutes ont tari la plupart des sources. L'aqueduc n'est plus alimenté aujourd'hui que par les eaux de la plaine de Paray et des coteaux de la Bièvre. Et l’eau, réputée jadis pour sa limpidité, est devenue impropre à la consommation.
L’eau de l’aqueduc alimenta quatorze fontaines : Voir 45, la « Maison du Fontainier »
Qualité de l'eau
Les eaux de Rungis furent longtemps réputées pour leur limpidité ; fortement calcaires, elles étaient efficaces dans les lessives.
A gauche : aqueduc Médicis à Montsouris lors des travaux de l’aqueduc de la Vanne
(photo A.J. Collard - 1869 – Gallica.bnf.fr)
A droite : rue de l’Empereur Valentinien
Pour plus d’informations :
http://ruedeslumieres.morkitu.org/apprendre/medicis/index.html
40 – L’aqueduc Médicis
Sections visibles au n° 42, avenue Reille et, un peu plus au nord, dans la rue de l’Empereur Valentinien
Aqueduc Médicis côté avenue Reille (moins visible aujourd'hui de ce côté)
Tracé de l'aqueduc marqué par les armes de Marie de Médicis