48 : Vendredi 2 novembre 1979 – C’est fini pour Jacques Mesrine
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48 : Vendredi 2 novembre 1979 – C’est fini pour Jacques Mesrine
48 : Vendredi 2 novembre 1979 – C’est fini pour Jacques Mesrine
48 : Vendredi 2 novembre 1979 – C’est fini pour Jacques Mesrine
48 : Vendredi 2 novembre 1979 – C’est fini pour Jacques Mesrine

48 : Vendredi 2 novembre 1979 – C’est fini pour Jacques Mesrine

Porte de Clignancourt (18e)

Ce vendredi vers 15h00, Jacques Mesrine et Sylvie Jeanjacquot quittent leur domicile et montent dans leur BMW, se dirigent vers la Porte de Clignancourt. Mesrine laisse passer un camion bâché qui vient de sa gauche puis s’engage dans le boulevard Ornano vers la sortie de Paris. Le camion se trouve devant la BMW et une Citroën GS à sa droite, du côté passager où Sylvie Jeanjacquot est assise.

La bâche se lève, quatre tireurs de la police tendent les canons de leurs fusils vers Mesrine ; le conducteur de la GS ouvre sa portière, sort et braque son arme vers le truand qui voit alors ce qui se passe ; ses mains lâchent le volant et glissent sous le tableau de bord. Les policiers du camion ouvrent le feu.

C'est la fin de celui qui avait fait tant d'efforts pour devenir l'ennemi public n° 1, pour faire parler de lui à tout prix, pour créer un personnage « plus grand que nature ».

Sommaire :

Jacques Mesrine avant Mesrine

La carrière de truand commence

Un séjour formateur au Québec

La machine médiatique démarre

Double assassinat

Etape Caracas avant le France

Décembre 1972, retour en France et début du show Mesrine

Le Théâtre Mesrine

En prison, tout faire pour ne pas être oublié

Le procès

Juge Petit, Paris-Match, Henri Lelièvre, c'en est trop !

La fin

La traque finale

La mort

Polémique sur la légitime défense

Commentaires

Jacques Mesrine avant Mesrine

Né en 1936 à Clichy, il est issu de la petite bourgeoisie, ses parents tiennent un commerce de dentelle de luxe à Paris. La famille vit dans un modeste deux pièces à Clichy.

Arrive la guerre, son père est fait prisonnier et Jacques est envoyé à la campagne. L'écrivain Philippe Roizès  estime que l'absence de son père et le peu de contact qu'il a avec lui à son retour sont une des clés du personnage Mesrine à venir : tout faire pour que son père le regarde. Ce dernier voudrait que Jacques fasse HEC mais il a peu de goût pour les études, alors il prendra le contre-pied : une délinquance de moins en moins excusable jusqu'à ce que son père lui impose une limite, ce qu'il n'observe pas ; Mesrine ne se fixera jamais de limites.

Les Mesrine ont une maison de campagne près de Louviers ; c'est là que commencent les premiers larcins avec des amis du coin qu'il a convaincus, des petits cambriolages, tandis qu'à Paris, il commence à fréquenter Pigalle, ses malfrats et ses prostituées.

En 1955 il rencontre dans un bal de la Cité Universitaire une étudiante d'origine togolaise de 21 ans, Lydia de Suza ; celle-ci le trouve « adorable », ils se marient en juillet 1955 et il adopte son fils, né d'une liaison précédente, Dominique, qui portera toujours le nom de son père adoptif. Mesrine est alors représentant en tissu. 

La jalousie obsessionnelle dont fait preuve Jacques dégrade assez vite la relation ; apparaît ainsi un des traits majeurs du caractère de Mesrine : il n 'accepte pas que les choses ne soient pas sous son contrôle. Le couple divorce ; Dominique ne connaîtra le destin de son père adoptif qu'à l'adolescence, ils échangeront en tout et pour tout deux courriers mais, pour Dominique, il restera son père.

La guerre d'Algérie : il s'engage. Arrivé en Algérie en juillet 1957, il est affecté à une unité qui réceptionne les pièces détachées pour les acheminer vers le front. Il racontera plus tard avoir vu des choses horribles pendant son service, il aurait été plusieurs fois de « corvée de bois », autrement dit chargé d'exécutions sommaires. Il n'y a aucune trace dans les dossiers de ses affirmations. Sa patrouille aurait été prise une fois dans un échange. Cela peut-il expliquer la violence qu'il exprimera plus tard ?

De retour en France en mars 1959, Il rapporte de son service un colt 45 qu’il portera souvent sur lui.

La carrière de truand commence

Il rencontre celle qui devient sa seconde épouse en 1961, Maria de la Soledad, avec qui il aura trois enfants : Sabrina, Bruno et Boris. Il est alors maquettiste dans un cabinet d'architecte et serait donc rangé s'il ne fréquentait pas les salles de jeu et ne commettait des cambriolages et, peut-être, s'adonnait-il

au trafic d'armes. Il connaît ses premières condamnations.

Avec Maria de la Soledad (mesrine803.skyrock.com)

La famille s'installe en Espagne. A Palma de Majorque, il est arrêté en train de voler des documents dans le bureau d'un gouverneur.

La famille s'installe alors aux Canaries où il s'improvise restaurateur, emploi de façade car il continue ses activités souterraines ; mais Maria arrête là les frais, elle le quitte avec les enfants qui ne reverront plus jamais leur père.

De retour en France, il fait la connaissance de Jeanne Schneider à Pigalle où elle est fichée comme prostituée (Mesrine se vantera d'avoir abattu ses souteneurs, sans aucune preuve).

En mai 1967, tous deux vont s'installer gérants d'une auberge près de Compiègne, l'auberge de Mont Saint-Mard à Vieux-Moulins ; la maire de la commune dira voir devant elle, un « monsieur, bon chic, bon genre, veste à carreaux, cravate, impeccable ». Son projet est moins chic : faire de l'auberge un tripot et un hôtel de passe. Jeannou est à la caisse, Mesrine au poker et l'établissement accueille vite une clientèle peu recommandable.

La violence du gérant est incompatible avec la tenue d'un bistrot, cela se passe mal avec les filles, l'endroit est fermé après des échanges de coups de feu. Pendant ce temps, les cambriolages continuent (Genève, Chamonix, Paris...).

Il est maintenant bien connu des services de police pour escroqueries ; il préfère quitter la France et s'enfuit au Québec début 1968.

Un séjour formateur au Québec

En juillet 1968, Mesrine et Jeanne s'installent à Montréal et trouvent un emploi auprès d'un homme d'affaires handicapé, Georges Deslauriers. Renvoyés à la suite d'une altercation, ils l'enlèvent avec l'aide d'un complice, une opération médiocrement menée ; le séquestré, bien qu'handicapé, réussit à s'échapper. Le couple prend la fuite et s'installe curieusement dans le village de Percé en Gaspésie, devenu un pôle artistique peu discret. Le 26 juin 1969, ils quittent le motel des Trois Soeurs pour les Etats-Unis où ils rentrent illégalement. Quatre jours plus tard, la patronne du motel est retrouvée, étranglée. Mesrine et Jeanne Schneider sont immédiatement soupçonnés, ils sont arrêtés dans l'Arkansas.

Percé, le Motel des Trois Soeurs


Mesrine est dorénavant entré dans le grand banditisme ; cette évolution s'accompagne d'une métamorphose de première importance : des journalistes attendent le couple criminel à la descente de son avion, avides d'informations. Mesrine découvre les médias et comprend immédiatement comment ils peuvent satisfaire sa soif de notoriété, il fanfaronne, pastiche le général de Gaulle, « Vive le Québec libre ! » et fait la connaissance de Raymond Daoust, avocat et propriétaire d'un journal spécialisé, Photo Police ; les deux hommes vont se trouver des intérêts communs, image médiatique d'un côté, tirage de l'autre. Mesrine fait maintenant la une des journaux et est déclaré « ennemi public n° 1 ».

Le retour de l'Arkansas – Jeanne Schneider, Mesrine et Raymond Daoust


Daoust sera leur avocat pour l'affaire de Percé, il ne leur évitera pas la prison. Après le grand banditisme et l'usage des médias apparaît le troisième ingrédient du personnage Mesrine, l'évasion. Il s'évade de la prison de Percé avec un autre détenu, Jean-Paul Mercier de la manière la plus simple, en enfermant le gardien à sa place dans la cellule. Après avoir libéré Jeanne, c'est la début d'une cavale à trois qui sera de courte durée.

La machine médiatique démarre

Mesrine est incarcéré dans une prison plus sécurisée puis au pénitencier de Saint-Vincent-de-Paul après qu'on eut découvert une corde et des outils dans sa cellule. Là, il va connaître les unités spéciales de correction, l'isolement, l'enfermement 24 heures sur 24 sans aucune activité, des conditions de détention causes de nombreux suicides et d'affections mentales.

Mesrine réussit à nouveau à s'évader le 21 août 1972 du pénitencier avec Jean-Paul Mercier. Il inaugure alors une pratique dont il usera à foison jusqu'à la fin : l'envoi de messages aux médias, à l'administration ou au pouvoir en place. Pour cette première, c'est une cassette envoyée à Raymond Daoust pour dénoncer les conditions de détention : « Si vous agissez en chien, vous attendez pas à ce qu’on agisse en colombe, si vous laissez l’unité spéciale de correction ouverte […] Je vous rends responsable personnellement de tout ce qui pourra arriver pour la faire fermer. Si vous voulez du spectaculaire, vous aurez du spectaculaire et du spectaculaire gratuit».

Et il passe de la parole aux actes en se lançant dans une opération vouée d'avance à l'échec : l'attaque du pénitencier pour libérer les détenus face à 65 gardiens. Lui et Jean-Paul Mercier sont blessés.

Dans le contexte politique des années 70, ils passent pour des révolutionnaires alors que leurs intentions étaient plus basiques :  libérer les prisonniers.    

Double assassinat

1972, c'est aussi l'année de sa rencontre avec Jocelyne Deraiche, caissière de supermarché ; elle a 18 ans et ce sera le grand amour de sa vie.

1972, c'est aussi une série de braquages avec Jean-Paul Mercier, audacieux, à l'image de deux braquages réalisés dans deux endroits distants de 8 kms avant que la police n'intervienne ; une autre fois, ils dévalisent la Toronto Dominion Bank et y reviennent trois jours plus tard : un duo efficace.

Mesrine fait trop de vent pour le milieu québecois ; le bandit français est trop voyant, met la police en effervescence, ce qui est mauvais pour les affaires, d'autant plus que Mercier et Mesrine vont commettre l'irréparable le 10 septembre 1972 : alors qu'ils s'entraînent au tir en forêt, ils attirent l'attention de deux gardes forestiers qui les contrôlent. On ne sait pas qui, de Mesrine, de Mercier ou des deux, a abattu Médéric Côté et Ernest St-Pierre

Les policiers mettent les bouchées doubles pour retrouver les meurtriers, les hauts responsables de la pègre sont exaspérés par la volonté du Français d'attirer l'attention ; tout incite Mesrine à quitter le Canada. Direction Caracas, via New-York.

Fin de l'équipée de Mesrine au Québec. Michel Ardouin, alias « Porte-avions » à cause du lourd arsenal qu'il transportait avec lui, l'a rencontré à ce moment-là : il considère que l'équipée contre le pénitencier a été montée par Mesrine uniquement pour se faire valoir. Pour lui, le professionnel c'est Mercier, c'est lui son formateur.

Etape Caracas avant la France

Mercier, Mesrine et leurs compagnes se retrouvent au Venezuela ; Ardouin, initié aux pratiques sud américaines, leur fait profiter de la protection bienveillante de la police locale, qui laisse dormir les mandats d'arrêt du Canada. Une villégiature dans une villa pendant quelques mois, mais le séjour est interrompu par une morsure de chien. Suzanne est blessée et ne peut être soignée sur place ; elle et Mercier décident de repartir au Québec où ils se font arrêter après un premier hold-up. Jean-Paul Mercier sera condamné à la perpétuité pour le meurtre des deux gardes chasse, avant de s’évader à nouveau et d’être tué d'une balle dans la tête au cours d’une attaque de banque.

A Caracas, Mesrine fait une gaffe : au cours d'une partie de poker dans un grand hôtel, il ne se contrôle pas et gifle le patron, lequel se trouve être ami du chef de la police. Il est temps pour Mesrine de quitter le Venezuela et, plutôt que de découvrir de nouveaux horizons, il choisit de revenir en France avec Jocelyne. Là, il va pouvoir déployer largement la panoplie dont il vient de se doter.

Décembre 1972, retour en France et début du show Mesrine 

Être considéré comme un criminel d'envergure ne lui suffit pas, son ego ne sera satisfait que lorsqu'il sera l'ennemi public n° 1 dans son pays. Il ne chôme pas. Avec Ardouin, les braquages de banques se succèdent à tel point que certains se font sans repérage préalable. Il ne se contente pas des vols à main armée ; ainsi, Ardouin et lui remplissent un contrat visant à exécuter en forêt de Versailles un jeune proxénète qui s'était mis à dos des caïds, deux balles dans la tête à bout portant, tirées par Mesrine.

Michel Ardouin

Après avoir blessé un policier dans un bar, il est vraiment dans le collimateur de la police, ce qui ne l'empêche pas de s'afficher dans les cercles de jeux. Le truand vantard commence à se fabriquer le personnage qui va faire la une des journaux pendant six ans.

Arrestation : Il a une première occasion de jouer le rôle de Mesrine ce même mois de mars, il est arrêté devant son domicile à Boulogne-Billancourt. A l'occasion de la perquisition, il offre aux policiers de partager une bouteille de champagne, une scène qu'il rejouera plus tard avec un célèbre commissaire.

Nouvelle évasion : une vieille affaire refait surface alors qu'il est en détention, des chèques sans provision remontant à l'époque de l'auberge du Vieux Moulin. Condamné à deux ans de prison, il fait appel et est transféré, le 6 juin, au tribunal de Compiègne pour être entendu. Arrivé sur les lieux, il dit avoir mal au ventre et doit aller aux toilettes ; là, il s'empare d'un Luger caché à l'arrière de la cuvette par un complice, embarque le gendarme qui l'escorte et prend en otage le président du tribunal, qu'il relâchera une fois monté dans la voiture des complices, laquelle démarre sous les coups de feu des policiers.

Maintenant, Mesrine est bien l'ennemi public n°1


Après l'attaque d'une imprimerie pour s'emparer de la paie des employés, il retrouve Jocelyne à Trouville mais son machisme, sa jalousie pathologique et sa violence ne sont plus supportés par Jocelyne qui repart au Québec.

Le Théâtre Mesrine

Son besoin de médiatisation va le dévorer de plus en plus, il va vouloir transposer et amplifier jusqu'à l'outrance le personnage qu'il a commencé à construire au Canada : un révolutionnaire en lutte contre l'administration pénitentiaire et la société en général, un gentleman capable d'offrir le champagne aux policiers ou de plaisanter avec les otages, un truand qui fait son boulot proprement.

Cette façade cache un homme de plus en plus violent, impulsif, irréfléchi, guidé par le simple appât du gain. Et un énorme besoin de notoriété.

Après un braquage avenue Bosquet, Mesrine reprend l'idée de deux braquages dans la même journée dans le XVIIIe arrondissement, le 27 septembre 1973. Commence-t-il à avoir des problèmes de recrutement ? il se lance dans ces opérations aventureuses avec des complices peu expérimentés, Ardouin mis à part. Le deuxième casse de la journée semble largement improvisé et se passe mal ; des coups de feu sont échangés, Mesrine réussit à s'enfuir mais un bandit est arrêté. Lors de son interrogatoire, celui-ci donnera l'adresse de la planque de Mesrine, 88, rue Vergniaud.

Le lendemain, 28 septembre 1973, Mesrine est arrêté. L'opération est menée par le commissaire Broussard, chef de la Brigade de Recherche et d'Intervention, plus connue à l'époque sous le nom d'«antigang ».

N'ayant aucune possibilité de fuite, Mesrine va utiliser son arrestation pour soigner son image : après des heures de négociation à travers la porte de son appartement, il accepte de l'ouvrir.

Il apparaît, bombant le torse,  cigare aux lèvres et, comme six mois auparavant, offre le champagne à Broussard en plaisantant avec lui et lui disant : « Broussard, tu ne trouves pas que c’est une arrestation qui a de la gueule».

Pour la postérité.... Le personnage commence à prendre le dessus sur l'homme. Ce sont pourtant ses erreurs et son impétuosité qui ont conduit à son arrestation ainsi que qu'à celle de Ardouin.

En prison, tout faire pour ne pas être oublié

Même à Fresnes, Mesrine est attentif à ne pas être oublié, à veiller à ce que le personnage qu'il façonne ne soit pas déconstruit. Ce qui est le cas d'un article publié dans L'Express en novembre 1975 et  intitulé « le duo Willoquet-Mesrine ». Mécontent du portrait qu'on fait de lui, Mesrine envoie une lettre de menace de mort à l'auteur de l'article, Jacques Derogy : « Vous pouvez vous attendre à la visite de certains de mes amis » « un bout de papier n’a jamais servi de gilet pare-balles», ce qui donne l'occasion au truand d'avoir son portrait en couverture de l'hebdomadaire le 17 novembre.

Mesrine est immédiatement inculpé pour menaces de mort, placé au secret et déplacé vers les Quartiers de Haute Sécurité, les QHS.

Son obsession de ne pas être oublié par les médias et le public le pousse à écrire son autobiographie qui est publiée en mars 1977, L'Instinct de mort. Il y écrit, entre autres, qu'il est l'auteur de près de quarante meurtres, mais aucun de ces crimes ne se rapproche d'une affaire non élucidée.

Le procès 

Début mai 1977, sous la présidence de Charles Petit, commence le procès de Mesrine et de trois de ses complices, dont Ardouin et celui qui a permis son arrestation ; le cas de Jeanne Schneider, incarcérée à Fleury-Mérogis mais malade, est disjoint.

Il faut six heures pour lire l'acte d'accusation.

Élégant, convenable, Mesrine dispose enfin d'une tribune à la hauteur de son ego et il va s'en servir : il fait une longue tirade sur les limites du système judiciaire, déclenche l'hilarité en disant « Je considère que je suis un truand qui fait son métier proprement. »

Le juge Petit

Lorsqu'on fait l'inventaire de toutes les armes trouvées chez lui mais dont le chargeur avait été enlevé : « Je ne voulais pas risquer la bavure, dit Mesrine. Je ne voulais pas qu'un policier se blesse» !

Et les faux passeports : « Demain matin, je peux en faire établir un à votre nom, M. le président». Les faux papiers : « J'allais les chercher à la préfecture de police».

Le président :

- Avec votre assurance, Mesrine, vous auriez pu agir avec des pistolets en plastique !

- Je suis entièrement d'accord, M. le président. Mais nous commencerons quand les « antigangs » feront la même chose.

- Mais, ce sont des gens d'armes...

- Les braqueurs aussi.

Au début d'une audience, il sort de son nœud de cravate une clé qu'il dit être celle de ses menottes et qu'il aurait achetée à un membre de l'administration pénitentiaire, pour 3 000 francs. Il jette aux journalistes la clé, cette preuve de la corruption de la police et de la justice, qui s'avèrera être la clé qui ouvre le cadenas de la télévision de sa cellule.

Les audiences se déroulent dans la confusion.

Le 19 mai 1977, il est condamné à 20 ans de réclusion pour vols à main armée, recel et port d'arme. Une sentence assez clémente.

Après le procès, il demande à voir Broussard en prison : « C’est normal en partant de saluer les amis» « Je me donne trois ans pour sortir, sinon je me tire une balle » « c’est con quand on se reverra ; on sera obligé de se tirer sur la gueule et c’est le premier qui tirera qui aura raison »

Juge Petit, Paris-Match, Henri Lelièvre, c'en est trop !

Mesrine à propos de ses conditions de détention dans les QHS : « Quand on vit dans un enfer, l’évasion est un droit. Je dirais même plus, elle est un devoir ».

Le 8 mai 1978, c'est chose faite à la Santé. Mesrine a réussi à faire dissimuler, par des complicités non encore identifiées, des armes dans le faux-plafond du parloir. Lui et un autre détenu profitent d'un entretien avec leurs avocats pour s'emparer des armes, neutraliser les gardiens, enfiler leurs uniforme ; ils libèrent un autre détenu, Christian Rives, escaladent le mur grâce à une échelle présente dans la cour pour travaux. Rives sera abattu par la police mais les deux autres disparaissent : Mesrine et François Besse, braqueur réputé, déjà auteur de trois évasions.  Toutes les forces de l'ordre sont en alerte.

Après un vol dans une armurerie parisienne, les braquages reprennent mais avec une violence et une impréparation accrues. Le 26 mai 1978, ils braquent le casino de Deauville. Auparavant, l'arrogance de Mesrine l'avait poussé à se présenter au commissariat comme commissaire parisien chargé d'apprécier les effectifs, cette même arrogance qui le pousse à se présenter au directeur du casino au moment de sortir et dire : « vous avez sans doute entendu parler de moi ».

Le braquage se termine mal, des échanges de coups de feu avec la police, il y a des blessés dont les deux truands ; après avoir forcé un barrage, ils prennent en otage un couple de fermiers et leurs trois enfants avant de disparaître.

Un mois plus tard, le 30 juin, c'est une agence de la Société Générale du Raincy qui est visée, avec nouvelle prise d'otages : le responsable de l'agence, sa femme, sa mère et un enfant en bas âge.

La police, qui subit déjà la pression des médias et du monde politique, a la mauvaise surprise de voir le Paris-Match du 4 août 1978  titrer en couverture : « Mesrine retrouvé ». Dans sa planque, le truand accorde une interview à Isabelle Pelletier ; le mythomane se raconte avec complaisance, menace quiconque voudrait tenter de l'arrêter, de l'« achever s'il le faut » ; il reprend sa diatribe contre les QHS et somme le ministre de la Justice de les fermer, le tout accompagné de photos de lui-même, les armes à la main.

Le truand est en train d'être phagocyté par son personnage, il devient une bête fauve.

Il franchit un cap le 10 novembre 1978 : accompagné de deux acolytes aux vagues idéaux gauchistes, peu fiables, et qui n'ont rien de gangsters de haut niveau, Jean-Luc Coupé et Christian Kopf, il tente l'enlèvement du juge Petit, le président du tribunal qui le condamna à vint ans de réclusion. Ce nouveau coup est mal préparé : il se trompe d'abord d'étage avant de se rendre compte que le juge n'est pas chez lui. Mesrine prend en otage la famille, aspergée de gaz lacrymogène, attend le retour du juge en proférant des discours pseudo-gauchistes mais deux enfants du juge réussissent à avertir la police. Mesrine s'en sort grâce à son déguisement mais Coupé est arrêté et se met à table lors de ses interrogatoires.

Ce n'est pas brillant pour ce bandit de haut vol ; Besse avait choisi de ne pas participer à l'équipée et cesse toute collaboration.

Il a atteint pourtant l'un de ses objectifs,en janvier 1979, Libération le nomme personnage médiatique de l'année...

21 juin 1979, c'est avec un autre malfrat, Michel Schayewski, qu'il se lance dans un autre coup près de Beaumont-sur-Sarthe : l'enlèvement dans sa maison de Henri Lélièvre, 82 ans, ancien banquier.

L'enlèvement s'étant déroulé en province, c'est l'Office Central de Répression du Banditisme, l'OCRB, dirigé par Lucien Aimé-Blanc, qui est en charge de l'affaire. Les deux hors-la-loi se sont fait passer pour des membres de l'OLP mais malgré les maquillages, les portraits robot faits d'après les descriptions du fils Lelièvre conduisent à Mesrine. 28 jours après l'enlèvement, la rançon est demandée, dix millions ramenés à six. Une première tentative de rencontre entre Michel Lelièvre, suivi à distance par les inspecteurs de l'OCRB, et les ravisseurs se termine par une fusillade.

La famille décide de ne plus collaborer avec la police. Une deuxième remise de rançon est organisée ; Henri Lelièvre est relâché après avoir signé une reconnaissance de dettes pour les 4 millions manquants, bien entendu sans aucune valeur mais imaginée par Mesrine « pour la galerie ».

Henri Lelièvre après sa libération

C'est un échec total pour l'OCRB, l'antigang de Broussard n'a pas mieux réussi. La pression est maintenant énorme pour les policiers ; ils sont ridiculisés à chaque forfait et Mesrine parade dans les journaux sans révéler quoi que ce soit de ses planques. Ils sont d'autant plus remontés qu'ils connaissent l'individu, sa violence, son sadisme, aux antipodes du bandit d'honneur des articles de journaux.

En cette fin d'été 1979, Mesrine est au zénith médiatique mais la fin est proche.

La fin

La traque de Mesrine est maintenant une obsession, la pression sur les policiers vient de tous côtés : la presse, les politiques, l'administration et même la famille et les amis.

Décision est prise d'arrêter la concurrence entre l'OCRB et l'antigang, on parlait même de guerre des polices : 20 inspecteurs de la BRI sont prêtés à l'OCRB.

Pendant ce temps, que fait Mesrine de l'argent de la rançon ? il achète des montres et une BMW, le révolutionnaire Mesrine n'est en fait qu'un consommateur banal.

Il y a des nouveaux autour de l'enragé, tous plus radicaux ; parmi eux, Charlie Bauer (photo), un vrai révolutionnaire, lui, jusqu'au-boutiste. La bande est décidée à mettre Paris « à feu et à sang » selon Schayewski.

En septembre 1979, Jacques Tillier, journaliste à Minute, ancien de la DST, apprend que Mesrine cherche à le voir. Conscient du scoop, il accepte le rendez-vous. Tillier sera successivement pris en charge par trois complices : un nommé Karbo dit Nounours, puis un autre du nom de Kiki, enfin Charlie Bauer qui conduit Tillier devenu très inquiet dans une grotte de la forêt d'Halatte.

Pas de scoop pour le journaliste, Mesrine veut se venger d'un article paru l'année précédent, article écrit avec une plume trempée dans le vitriol. Dès l'arrivée, Mesrine demande à Tillier de se déshabiller, le frappe et l'insulte. Alors que le journaliste est couché à terre, Mesrine lui tire trois balles, dans la joue, «  pour l'empêcher de dire des conneries », le bras, « pour l'empêcher d'écrire des conneries » et la jambe, « par simple plaisir », affirmera-t-il plus tard. Plutôt que l'exécuter, il a préféré le voir souffrir et a poussé le sadisme jusqu'à enregistrer la scène. Le journaliste s'en tire par miracle, réussit à se traîner jusqu'à la route où un automobiliste l'emmène à l'hôpital, à  demi mort.

Jacques Tillier se déshabille, filmé par Mesrine – Les cicatrices


Mesrine n'a pas supporté que Tillier écrive qu'il n'était pas fiable ; il a égratigné l'image du personnage. Quelques journaux publieront les photos de Tillier nu et ensanglanté, envoyées par le tortionnaire.

Sa folie narcissique l'a poussé trop loin, le ton dans la presse change, son ego boursouflé le pousse à vouloir se venger d'un nombre toujours plus grand, dont un fils du président de la République.

Comme au Québec quelques années plus tôt et pour les mêmes raisons, le milieu veut maintenant se débarrasser de lui, il y aurait eu un contrat sur lui.

La folie narcissique n'a plus de limites


La traque finale

Tillier identifie Bauer, bien connu des services, parmi les membres du traquenard.

Les policiers apprennent que Bauer vit avec Renée Gindrat, professeure en arrêt de travail pour longue maladie ; elle possède une R14 et a écopé d'un PV rue Saint-Lazare le 23 octobre 1979. Au bout de 48 heures de recherche, ils repèrent la voiture sur un parking proche de cette rue. Quelques jours plus tard, Charlie Bauer est « logé » et mis sur écoute ; la voix de Mesrine est identifiée. Bauer est alors filé par une quinzaine d'hommes avec beaucoup de précautions.

Bauer et Renée mènent ainsi les policiers à la planque de Mesrine, au 3e étage du 35-37, rue Bélliard, près de la Porte de Clignancourt.

Mesrine, sa nouvelle compagne, Sylvia Jeanjacquot, Bauer et Renée sortent. Une quinzaine d'inspecteurs sont là, boulevard Ornano, au milieu de la foule ; il est impossible de lancer une action étant donné la dangerosité des deux repris de justice. Emmanuel Farrugia, de l'OCRB, à l'origine de la filature, en réfère au directeur général de la police qui saisit la BRI de Robert Broussard pour procéder à l'arrestation.

On laisse Bauer repartir chez lui et le domicile de Mesrine est sous contrôle, ce 31 octobre.

La mort

René-Georges Querry est chargé d'organiser les équipes. Il installe un camion bâché avec quatre tireurs près d'une rue peu fréquentée ; les tireurs ont pour mission de couvrir les inspecteurs en cas d'une interpellation à pied. Il aura finalement un autre rôle.

Le 2 novembre vers 15h00, avec barbe et perruque, le hors-la-loi sort, l'opération est déclenchée. Il est avec sa compagne, monte dans sa BMW, se dirige vers le boulevard Ornano pour tourner à droite vers la Porte de Clignancourt ; le camion est déplacé et, par un heureux hasard, passe devant la BMW, Mesrine fait signe au camion de passer ; il est maintenant juste devant la BMW. Le boulevard est très encombré et, deuxième coïncidence, la Citroën GS de Querry se trouve bloquée à côté de la BMW, du côté de Sylvia Jeanjacquot, un peu en avant.   

15h15 : les tireurs ont relevé la bâche et attendent le signal. Ils braquent Mesrine ; Querry sort de sa voiture, pointe son arme sur Mesrine à travers le pare-brise ; Mesrine comprend, il lâche le volant et glisse sa main sous le tableau de bord. Les policiers du camion ouvrent le feu, tirent 21 balles dont 18 dans le corps de Mesrine ; Sylvia Jeanjacquot est grièvement blessée mais survivra.

Farrugia procède immédiatement à l'arrestation de Bauer.


Diaporama (survoler l'image)

Polémique sur la légitime défense

Un débat qui ne sera jamais clos.

Les policiers sont persuadés d'une chose : abattre au moindre geste suspect Mesrine, emporté par la folie de son personnage. « Etant donné sa dangerosité, vous êtes d’office en légitime défense » , leur aurait dit la procureur.

Au pied de Sylvie se trouvait un sac où il y avait deux grenades défensives américaines d'une grande dangerosité. Les menaces qu'il avait proférées à Broussard deux ans plus tôt était claires.« Quand nous nous rencontrerons à nouveau, ce sera à celui qui tirera le premier».

D'après des témoins, il semble qu'il n'y ait pas eu de sommations - les policiers ne sont pas dans l'obligation d'effectuer des sommations en cas de légitime défense.

Des plaintes ont été déposées contre les policiers ; ils ont tous bénéficié d'un non-lieu.

Commentaires

Charlie Bauer : il ne le considère pas Mesrine comme un militant révolutionnaire, il manque de fond et de réflexion.

Marie-Christine Etelin, son avocate : elle n'est pas dupe non plus sur la sincérité de son engagement.

Michel Ardouin : « Mesrine n'a jamais été mon ami ; humainement, il n'était pas intéressant, il était toujours prêt à sacrifier ses complices, ses gonzesses, son entourage»

Il s'est fabriqué un « personnage plus grand que nature », dit Stéphane Berthomet.

Thierry Lagier, criminologue : « c'est une victime du complexe d'Erostrate » : 356 av. J.-C., Érostrate cause volontairement un incendie qui détruit totalement le temple d'Artémis à Éphèse. Interrogé sous la torture, Érostrate avoue les motivations de son geste : il cherche à tout prix la célébrité et n'a pas d'autre moyen d'y parvenir. Les Éphésiens interdisent alors à jamais que son nom soit cité. L’historien Théopompe le mentionne pourtant, puis Strabon, Élien et Solinus qui font passer le nom d'Érostrate à la postérité.


 


Compléments :

Les six podcasts de Stéphane Berthomet sur France Culture :

Mesrine, l'orgueil et le sang : un podcast à écouter en ligne | France Culture (radiofrance.fr)

Philippe Roizès, Mesrine. Fragments d'un mythe, Flammarion, 2009,

 Wikipedia

L'Instinct de mort, Jean-Claude Lattès, 1977 rééd. Champ Libre, 1984

Gérard Lebovici a apporté sa protection à Sabrina, la fille de Mesrine, le parfait symbole de la liberté pour les gens de l'époque. Il dit le « redoutable honneur » que représente pour Champ Libre le fait d'être le nouvel éditeur de Mesrine. Le 5 mars de l'année de la réédition, en soirée, au volant de sa voiture garée dans le parking public souterrain du 41de l'avenue Foch dans le 16e arrondissement ; il est tué de quatre balles dans la nuque, tirées à bout portant.