Jules Dalou 1838-1902
Travailleur acharné et exigeant. Il excelle aussi bien dans les oeuvres intimes que les projets monumentaux ; il se considère toujours comme artisan plutôt qu'artiste.
Comme plusieurs de ses contemporains, il s'applique à représenter la réalité du corps en mouvement et ne cède pas aux canons de l'académisme.
Issu d'un milieu modeste, il sera sa vie durant un ardent républicain, fidèle à ses origines et un patriote ; l'essentiel de son oeuvre le démontre.
Jeunesse
Aimé-Jules Dalou est né le 31 décembre 1838 à Paris. Il est le dernier enfant d'un ouvrier gantier, ardent républicain. Ses parents protestants l'élèvent dans la laïcité et l'amour de la République.
Jules Dalou montre très jeune des dons pour le modelage et le dessin ; cela lui vaut l'attention de Jean-Baptiste Carpeaux qui le fait entrer en 1852 à la "Petite Ecole", future Ecole nationale supérieure des arts décoratifs de Paris. A quinze ans, il est admis à l'Ecolde des beaux-arts de Paris.
Aucune carrière officielle ne s'offre à lui ; comme beaucoup de sculpteurs de son temps, il commence à gagner sa vie en travaillant pour des ornemanistes (spécialistes de l'ornement), des fabricants de bronze, des orfèvres. C'est chez l'un d'eux que débute son amitié avec Auguste Rodin.
Premières oeuvres
Paris est alors en pleine mutation, Dalou se forge une expérience dans les grands chantiers de la capitale en produisant de la sculpture décorative pour des immeubles sur les grandes avenues parisiennes : à ce titre il participe à la décoration de l'hôtel de La Païva en fournissant des modèles.
Après avoir mené une vie de bohème, Dalou épouse Irma Vuillier le 3 juillet 1866. Couturière de son état et nièce d’un ami, le peintre Elie Auguste Maillard. Elle a dix ans de moins que lui et c’est une femme de fort caractère (« un caractère d’une droiture inflexible », dira son mari).
Elle mourra en 1900.
Ils demeurent 102, rue du Cherche-Midi lorsque naît leur fille unique, Georgette, née avec un handicap mental qui nécessite, jusqu’à sa mort pendant la Première Guerre mondiale, la présence à ses côtés d’un adulte responsable. C’est pour assurer le financement de l'hébergement. C’est pour assurer le financement de l'hébergement à vie de sa fille par l’Orphelinat des Arts que Dalou lègue le fonds de son atelier à cette institution ; plus de 300 œuvres seront achetées par la ville de Paris à l’orphelinat en 1905.
Dalou et le Salon
Exposition annuelle des œuvres approuvées officiellement par l’académie de peinture et sculpture, à partir des années 1860, le Salon entre en déclin, concurrencé par les galeries des marchands d’art et les écoles de peinture.
C’est dans ces années-là que Jules Dalou expose : en 1864, un modèle d’un relief de l’hôtel de la Païva, en 1867 un Baigneur, en 1869 un Daphnis et Chloé et, en 1870, la Brodeuse. Ces deux dernières pièces sont acquises par l'État.
Le salon de 1869 vu par Cham dans le Charivari (gallica.bnf.fr)
La Commune de Paris
La carrière naissante du sculpteur est stoppée net par le conflit avec la Prusse et la défaite de Sedan le 2 septembre 1870. Plus de travail ni pour les ouvriers, ni pour les artistes.
Dalou, républicain et patriote convaincu, s’engage dans la garde nationale après la proclamation de la République, le 4 septembre.
Malgré le terrible siège de Paris durant l’hiver 1870-1871, Dalou n’accepte pas la capitulation du gouvernement de Thiers en mars 1871. Il est solidaire des insurgés de la Commune de Paris ; il est
capitaine au 83e bataillon des fédérés. Gustave Courbet que l’on vient d’élire à la Fédération des artistes de Paris, appelle Dalou auprès de lui et le fait nommer administrateur provisoire adjoint au musée du Louvre, au côté d'Henry Barbet de Jouy, avec pour mission de protéger les collections du vandalisme. Le 17 mai, Dalou et sa famille, pour mener à bien sa surveillance, s’installent dans le musée.
La Commune de Paris
La carrière naissante du sculpteur est stoppée net par le conflit avec la Prusse et la défaite de Sedan le 2 septembre 1870. Plus de travail ni pour les ouvriers, ni pour les artistes.
Dalou, républicain et patriote convaincu, s’engage dans la garde nationale après la proclamation de la République, le 4 septembre.
Malgré le terrible siège de Paris durant l’hiver 1870-1871, Dalou n’accepte pas la capitulation du gouvernement de Thiers en mars 1871. Il est solidaire des insurgés de la Commune de Paris ; il est capitaine au 83e bataillon des fédérés. Gustave Courbet que l’on vient d’élire à la Fédération des artistes de Paris, appelle Dalou auprès de lui et le fait nommer administrateur provisoire adjoint au musée du Louvre, au côté d'Henry Barbet de Jouy, avec pour mission de protéger les collections du vandalisme. Le 17 mai, Dalou et sa famille, pour mener à bien sa surveillance, s’installent dans le musée.
L'exil à Londres (1871-1879)
Au lendemain de la Semaine sanglante de mai 1871, Dalou, sa femme et leur fille sont menacés. Le 6 juillet, ils rejoignent l'Angleterre et sont accueillis par son ancien condisciple de la Petite École, le peintre Alphonse Legros.
Arrivée à Londres avec bien peu de choses, la famille bénéficie heureusement d’un accueil bienveillant de membres de l’aristocratie.
Dalou réalise une série d’œuvres qui plaisent à sa nouvelle clientèle : statuettes féminines en terre cuite (Liseuse, Berceuse) et portraits de l'aristocratie anglaise. Son talent reconnu lui vaut d’être exposé et d’enseigner à la fameuse Slade School.
Il est aussi l’auteur d’un monument, la Charité, qui surmonte une fontaine de la City, ainsi que d’un monument funéraire à la mémoire de 5 petits-enfants de la Reine Victoria morts en bas âge pour la chapelle privée de Windsor.
Le 1er mai 1874, le 3e Conseil de guerre de Paris le condamne aux travaux forcés à perpétuité par contumace pour ses fonctions d'officier dans la Commune et son poste d'administrateur adjoint du Louvre.
Œuvres de la période anglaise
La Paysanne française allaitant (1873), Londres, Victoria and Albert Museum.
Dorothy Heseltine (1874), Pittsburgh, Carnegie Museum of Art.
La Liseuse (vers 1871-1879), Paris, Petit Palais.
La Charité (copie en bronze de 1897), Londres, Exchange Avenue.
Toutefois, son séjour londonien se termine par un scandale, une Bacchanale présentée au Salon de la Royal Academy de Londres. Il écrit à Ernest Cornaglia : « tant qu’ici j’ai traité des sujets very sweet, des douces mères et des enfants bien sages, on m’a serré la main affectueusement, mais voilà que […] j’attaque enfin le taureau par les cornes […], alors tout change et je ne vois plus, quand je rencontre un académicien, qu’un homme au visage embarrassé qui cherche à m’éviter comme si je venais de commettre un pet à table. »
Douze ans plus tard (1898), il reprendra ce thème (Bacchanale, fontaine des serres d'Auteuil).
Dorénavant sculpteur officiel, bien introduit dans les milieux politiques, avec l’appui de Viollet-le-Duc, Jules s’installe 22, avenue du Maine alors que son atelier se trouve à trois pâtés de maison. C’est à cette dernière adresse qu’il meurt le 15 avril 1902. Il repose dans le cimetière de Montparnasse.
Il n’aura pas eu le temps de réaliser son dernier grand projet, Le Monument aux Travailleurs, témoignage de sa fidélité à ses origines.
Prolifique Jules Dalou
Dans notre inventaire, nous avons identifié une trentaine d’œuvres visibles dans Paris, monuments publics, stèles, gisants …
Il faut y ajouter les 400 œuvres issues du fonds de l’atelier de Dalou conservées au Petit Palais, celles qui se trouvent au musée d’Orsay, en Province, aux USA, en Suisse, les œuvres anglaises, etc. Sa réputation de travailleur acharné n’est pas usurpée.
Sans oublier de nombreux bustes : entre autres, Charcot (1884), Auguste Vacquerie (1885), Henri Rochefort (1888), Gustave Courbet (1890), Mlle Gilardi (1890), Paul Richer (1900), Jean Gigoux (1900).
L’art de Dalou selon Encyclopædia Universalis :
Dans les programmes monumentaux qu'il réalisa, on décèle la conception profondément démocratique que Dalou, artiste républicain, avait de la sculpture ; il ne s'en départit guère. Il se tint à l'écart de l'esthétique symboliste qui nourrit une grande partie de l'art de Rodin, et resta un réaliste, trouvant l'inspiration de ses sujets non monumentaux dans le familier, le réel et le quotidien.
Principales références :
Dalou à Paris (A.Simier, D.Imber, G.Groud – Ed. Paris musées 2010)
Wikipedia
https://www.evous.fr/PREMIERS-JOURS-Dalou-Sculpteur-de-la-Republique-au-Petit-Palais,1182479.html (André Balbo)
https://www.latribunedelart.com/sculptures-par-carpeaux-dalou-et-carries-au-petit-palais
Une statue place de la République
Ayant toujours refusé de demander grâce, il observe l’évolution politique en France. Mac-Mahon quitte la présidence début 1879 et est remplacé par Jules Grévy. Les républicains entrent en force dans les Chambres.
Désormais, l’intention de Dalou est claire, de revenir à Paris, seul endroit où il pourra faire ses preuves. L’amnistie pour les Communards est accordée en mai 1879.
Il se trouve que l’année précédente, le conseil municipal de Paris, à majorité radicale, avait proposé l'érection d'un monument à la gloire de la République. A Londres, Dalou avait préparé activement son projet.
Il ne l’emporte pas ; les lauréats sont les frères Morice : Léopold pour la statuaire et Charles pour le socle.
Le projet de l’ex-exilé a cependant retenu l’attention du Conseil municipal. Son groupe statuaire, arrivé second, fait l’objet d’une commande de la ville de Paris pour la réalisation d'un monument à ériger sur la place du Trône (celle-ci deviendra place de la Nation l’année suivante).
Dalou consacre vingt années à la réalisation du monument. Le Triomphe de la République ne sera inauguré qu’en 1899.
Dalou décoré par le président Emile Loubet (le Petit Parisien)