29 : 1er avril 1810 : Le mariage avec Marie-Louise d’Autriche

Joséphine est répudiée (15 décembre 1809)

Dès avant 1804, la perspective d’un Empire héréditaire inquiète Joséphine qui craint d’être stérile. Joséphine est déjà mère de deux enfants et Napoléon a des doutes sur sa propre capacité à engendrer une descendance. En 1802, Joséphine tente une manœuvre : Hortense, l’épouse de Louis Bonaparte, le plus jeune de la fratrie, donne naissance à un fils ; Joséphine propose à Louis que son frère l’adopte. Refus de ce dernier. En 1804, elle tente de dissuader Napoléon de devenir empereur, espérant ainsi éluder le problème dynastique.

Avec l’avènement de l’Empire, l’absence d’enfant devient une affaire d’état. La naissance en 1806 d’un enfant naturel avec Eleonore Denuelle lève toute ambiguïté quant à la possibilité de procréer de Napoléon. Dès lors, le sort de Joséphine est scellé. La stérilité de l'impératrice fait l’objet des moqueries de la famille qui ne l’a jamais acceptée.

La répudiation de Joséphine est décidée. Le divorce est signé le 15 décembre 1809 et prononcé par un sénatus-consulte le lendemain ; le mariage religieux est annulé début 1810.

Joséphine conserve le titre d’impératrice douairière. Elle reçoit le palais de l'Élysée, le château de la Malmaison et le château de Navarre près d'Évreux.

Elle se retire à la Malmaison où Napoléon lui rend visite régulièrement.

Fin mai 1814, elle accepte de recevoir le tsar Alexandre Ier. Quelques jours plus tard, elle s’éteint, victime d’une pneumonie (nota : fin juin 1815, Napoléon se rendra une dernière fois à la Malmaison, après Waterloo et sa reddition et juste avant le départ pour Sainte-Hélène).

Séparé de Joséphine, l’empereur est dorénavant libre. 

Trois alliances sont envisagées : Maria Auguste Princesse de Saxe, la Grande duchesse Anna Pavlovna, la plus jeune des soeurs d'Alexandre Ier, et l'Archiduchesse d'Autriche Marie-Louise, fille de François Ier.

Alexandre n’est pas favorable à cette union et Anna Pavlovna n’a que quinze ans.

Le choix se porte sur Marie-Louise : « Monsieur mon Frère, je fais partir demain mon cousin le vice-connétable, prince de Neuchâtel, pour demander à Votre Majesté Impériale l'archiduchesse Marie-Louise, sa fille, en mariage. […] On me fait espérer que Votre Majesté voudra y consentir. ».

Marie-Louise a été élevée dans l’exécration de « l'ogre corse », l’homme d’Austerlitz qui avait occupé Vienne et poussé sa famille à fuir. « Papa est trop bon pour me contraindre sur un point d'une pareille importance. […] Depuis le divorce de Napoléon, j'ouvre la Gazette de Francfort dans l'idée d'y trouver la nomination de la nouvelle épouse, et j'avoue que ce retard me cause des inquiétudes. »

Inquiétudes confirmées : le 9 mars 1810, Berthier et Metternich signent, à Vienne, le contrat de mariage, suivi de la cérémonie par procuration dans l’église des Augustins.

Quelques jours plus tard, Marie-Louise part pour Paris, via la Bavière, l’Alsace, et Reims.

La rencontre entre les deux époux est prévue à Compiègne mais Napoléon, pressé comme souvent, décide de rejoindre le cortège de Marie-Louise dans le village de Courcelles, hors du protocole. Après Compiègne, Saint-Cloud où Marie-Louise est présentée à la cour le 31 mars.

 
Le lendemain, 1er avril, le mariage civil est célébré au Palais des Tuileries. Suivent un dîner et un spectacle : Iphigénie en Aulide de Racine avec Talma dans le rôle d'Achille.


Le 2 avril 1810, se déroule le mariage religieux dans le Salon carré du Louvre transformé pour l'occasion, en chapelle, par l'architecte Fontaine, sur les indications d'Isabey. Le soir, un grand banquet du mariage est organisé dans la salle de spectacle du palais des Tuileries transformé en salle des fêtes.

Enfin, le lendemain du mariage, une réception est organisée dans la salle du trône. L'Empereur et l'Impératrice entourés des princes, princesses et de la Cour, reçoivent les hommages et les félicitations des Corps de l'Etat.

Un an plus tard, le 20 mars 1811, Marie-Louise donne naissance à Napoléon François Charles Joseph Bonaparte qui reçoit le titre de Roi de Rome.

Gallica.bnf.fr


Pour en savoir plus : E. Papot, H. Davey Wright 2010

Cette chronologie fait partie de notre dossier thématique : 1er-2 avril 1810 : le mariage de Napoléon Ier et Marie-Louise


30 : 1811 : Napoléon dans son cabinet de travail aux Tuileries

Jacques-Louis David – National Gallery


Ce portrait est l’œuvre de David à la demande d’un écossais, le marquis de Douglas (futur duc de Hamilton). Le tableau est achevé en 1812 et présenté au public dans son atelier, « une foule innombrable de monde par son extrême ressemblance avec cet homme immortel… personne jusqu’à ce jour n’a encore fait un portrait plus ressemblant » (propos de David)

La main dans le gilet, Napoléon porte l’uniforme de colonel des Grenadiers à pied de la Garde, celui qu’il mettait ordinairement le dimanche. L’Empereur est âgé de 42 ans. Le jeune à la silhouette efflanquée et au visage émacié du Consul a laissé la place à un homme rondouillard.

 
« Les bougies consumées, l’horloge marquant quatre heures sonnées, la plume et les papiers épars sur le bureau, tout indique que le souverain a passé la nuit à travailler au Code civil. L’aube se lève et Napoléon s’apprête maintenant à passer ses troupes en revue. »  Karine Huguenaud, septembre 2006         
https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/tableaux/napoleon-dans-son-cabinet-de-travail-aux-tuileries/


Napoléon vu par Jean Tulard (Napoléon – Ed. Fayard)

Traits de caractères

« Sa machine de travail, c’est son propre cerveau, les autres ne sont que des rouages […] Capable de passer d’un sujet à l’autre instantanément, Napoléon a la faculté d’ouvrir et fermer à volonté les tiroirs de son cerveau. Son orthographe est correcte, sauf pour certains mots, irrévocablement déformés : gabinet pour cabinet, enfanterie pour infanterie. Lapsus qu’on retrouve dans son langage, armistice pour amnistie, […] Sa mémoire est prodigieuse […] Il a une sorte de manie statistique, toujours à demander combien : combien de poules en France, de bateaux sur telle rivière, de sacs de blé dans telle halle. »

Une journée aux Tuileries

« Réveillé à sept heures, l’Empereur se fait lire les journaux, les rapports de police, examine les factures de ses fournisseurs et s’entretient avec ses familiers. A huit heures, il est dans son cabinet de travail où il dicte son courrier à ses secrétaires […] A neuf heures : petit lever suivi à dix heures d’un déjeuner expédié en dix minutes et arrosé de l’habituel chambertin coupé d’eau […] Il retourne dans son cabinet où l’attend l’étude des dossiers, des livrets et des états […]. A une heure de l’après-midi, il assiste aux séances du Conseil des ministres, du Conseil d’Etat ou des conseils d’administration […] Après dîner, il s’attarde au salon avec l’impératrice, parcourt les derniers livres que lui communique son bibliothécaire, puis retourne dans son cabinet de travail […]. Couché à minuit, il se réveille à trois heures pour réfléchir aux affaires les plus délicates, prend un bain chaud puis se recouche à cinq heures. »


31 : 20 mars 1811 : Tuileries – naissance du Roi de Rome


C’est au rez-de-chaussée de l’aile sud que naît Napoléon François Joseph Charles Bonaparte le 20 mars 1811.

Promenade de S.M. le roi de Rome dans sa calèche sur la terrasse des Tuileries (Gallica.bnf.fr)


L’héritier du royaume de France portait le titre de Dauphin ; le fils de Napoléon 1er sera roi de Rome, c’est-à-dire celui que portaient les héritiers du Saint-Empire romain germanique. Napoléon exprime ainsi les prétentions européennes de sa dynastie.

L’enfant est baptisé le 9 juin 1811 dans Notre-Dame en se calquant sur le cérémonial du baptême du fils de Louis XVI, dernier dauphin de France.

Campagne et retraite de Russie, Leipzig, campagne de France : Napoléon a peu de moments d’intimité avec son fils, et son épouse. Il les embrasse pour la dernière fois le 24 janvier 1814 avant la campagne de France qui se termine par son abdication le 6 avril 1814. Le petit Napoléon n’a que trois ans.

Le Sénat se prononce pour la restauration des Bourbons. Napoléon refuse que son épouse et leur fils l’accompagnent dans son exil ; ils quittent la France pour l’Autriche le 23 avril.

Après Waterloo et la seconde abdication de Napoléon Ier, une commission présidée par Fouché déclare que l’enfant est successeur de son père sous le nom de Napoléon II, alors qu’il est en Autriche ; mais aucune proclamation n’est faite. Le 8 juillet 1815, Louis XVIII entre dans Paris. Napoléon II ne l’aura été que durant quinze jours !

A Vienne, l’empereur François Ier le traite comme un membre de sa famille et lui confère le titre de duc de Reichstag, une ville de Bohême. On prend soin à la cour d’éviter autant que possible l’évocation de son père et jamais en mal. C’est par le biais du Mémorial de Sainte-Hélène que l’empereur déchu s’adresse à son fils.

Début 1832, l’état de santé de celui que Victor Hugo surnommera l’Aiglon se dégrade : congestions pulmonaires, pneumonie. Mal soigné, il meurt de tuberculose le 22 juillet 1832, dans le château de Schönbrunn.

Coup de la propagande nazie, ses cendres seront rapatriées en France en 1940 (« Ils nous prennent le charbon et ils nous rendent les cendres ! »). Elles se trouvent aux Invalides.


32 : 14 novembre 1813 : Napoléon revient aux Tuileries


Il revient en vaincu de la campagne d’Allemagne mais il n’est pas découragé ! Manquant de troupes fraîches, il relance la conscription et recrute les adolescents. C’est à partir de cette époque que va naître la légende de l’Ogre. Nombreux sont les jeunes qui fuient la conscription, certains allant jusqu’à se mutiler pour ne pas connaître les horreurs de la guerre. Il n’est plus question de conquête ou de maintien de l’Empire mais de défendre l’intégrité du territoire national. La conscription touche même les fils de notables, 100.000 d’entre eux deviennent gardes d’honneur. Fin 1813, trois armées alliées franchissent le Rhin ; c’est le début de la campagne de France. Sur le Chemin des Dames et à Craonne, Napoléon opposera les jeunes « Marie-Louise » aux soldats de Blücher.